T  H  E     F  I  S  H  I  N  G     C  A  T     P  R  E  S  S

L'objectif de seashores et de l’estran est de partager des haïkus du monde entier et d'explorer comment la Voie et l'esprit du haïku, avec son pouvoir de nous connecter à la nature et à notre monde, peuvent jouer un rôle dans la poésie et dans nos vies en général.

 

Considérations et principes généraux

seashores & l’estran

DIVERS CONSEILS ET CONSIDÉRATIONS

Les conseils ci-dessous ont été rédigés pour donner un retour général et aider les contributeurs avant d’envoyer leurs haïkus ou ceux dont les soumissions n’ont pas été acceptées. Bien que chaque sélection soit subjective et qu’aucun juge n’aura jamais raison à 100 %, et que tous les contributeurs devraient rechercher plus d’une source de commentaires ou de critiques, certaines soumissions reçues ne seraient probablement pas considérées comme « vraiment de bons haïkus/senryus » par la plupart des revues et des sites Web de haïku.

 

Nous recevons un certain nombre de soumissions qui sont des poèmes et présentent un intérêt poétique mais qui ne sont pas des haïkus et ne sont donc pas sélectionnées.

 

Les conseils et considérations ci-dessous ont été produits à la lumière de ces haïkus/senryus reçus dans le but de clarifier certaines caractéristiques du haïku « non négociables » et d’aider à distinguer les différences entre les poèmes courts et les haïkus.

 

Introduction

Je voudrais, pour commencer, souligner qu’il s’agit d’une introduction générale sur les principes et les considérations du haïku pour les soumissions à seashores/l’estran, une revue internationale pour partager l’esprit du haïku, et seulement pour cette revue, et son numéro annuel francophone, bien que ces lignes directrices ou principes reflètent sans doute, plus ou moins, la plupart des revues et des sites de haïku dans le monde. Mais il peut toujours y avoir des perspectives et aspirations différentes, et c’est pourquoi je pense qu’il est important de rechercher plus d’une source de critique/jugement et de se mettre en relation avec d’autres revues en ligne ou imprimées, mais également des groupes ou des associations de haïku.

 

Principes généraux

 

LE MOMENT HAÏKU

Tout bon haïku possède ou transcrit ce qui est généralement décrit comme un « moment haïku » : un moment, un événement observé/vécu qui a conduit à une émotion.

 

Par conséquent, un haïku peut être décrit comme la transcription objective ou l’esquisse d’un moment qui a conduit à une émotion (un sentiment ou une sensation). Un haïku met en exergue un moment et recrée les circonstances dans lesquelles le poète a ressenti l’émotion (moment-haïku) et permet au lecteur de vivre/revivre ce moment, de ressentir à nouveau cet événement et cette émotion.

 

À l’origine, le « cœur » d’un haïku était la NATURE. Le haïku est associé à la nature et cette forme est souvent considérée ou présentée comme une poésie de la nature. Le haïku présente un événement se déroulant dans un contexte naturel et saisonnier. Cela concerne le « célèbre » kigo (ou mot de saison), si important dans le haïku traditionnel (voir ci-dessous).

 

Mais, même si la majorité des haïkus concernent encore plus ou moins la nature, les choses ont évolué ou changé, et les haïkus sont également écrits sur des sujets modernes, y compris la vie ou les conditions humaines, les activités, etc. Généralement, les haïkus qui ont un thème/sujet non naturel, et qui peuvent « voir le côté drôle de la vie » sont appelés senryu. Certains poètes et journaux font une distinction entre haïku et senryu.

 

HAÏKU vs POÉSIE OCCIDENTALE

Un haïku n’est peut-être pas exactement un poème (dans la définition ou la tradition occidentale), mais c’est de la poésie ; une forme de poésie avec des règles différentes. Cela signifie que le haïku ne s’appuie pas sur des techniques et des dispositifs stylistiques occidentaux (rimes, métaphores, comparaisons, correspondances, répétitions, etc.)

 

La valeur poétique (et parfois philosophique ou métaphorique), c’est-à-dire la poésie (ou la poétique) se trouve « à l’intérieur » du haïku et non « à l’extérieur »... C’est l’impact du haïku qui est plus poétique que « l’enveloppe » réelle du verset.

 

Un haïku n’est pas :

·  Un proverbe

·  Une épigramme (courte déclaration pleine d’esprit, généralement rimée)

·  Un aphorisme (déclaration laconique en prose)

·  Un quatrain, court ou plus court

 

Beaucoup des soumissions que nous recevons et qui sont rejetées sont en fait des pensées, des proverbes, des épigrammes, des déclarations ou des constats écrits ou présentés sur trois lignes. Ces textes sont intelligents, parfois très poétiques ou intéressants, d’autres fois « accrocheurs » ou littéraires, mais ce ne sont pas des haïkus. La plupart du temps, le défaut fondamental est qu’ils ne possèdent ni ne font ressortir un moment concret, une expérience particulière. Ils sont un commentaire ou le résultat d’une réflexion, d’une pensée. Pas le résultat du contact concret, réel entre l’homme et la Nature (ou le monde).

 

POÈME OBJECTIF

Un haïku est objectif dans la mesure où il n’exprime pas l’opinion du poète (pas de choses comme « ce chien intelligent », « comme c’est intelligent », « comme c’est triste »...) ou ne décrit pas ce que le poète a ressenti (« c’était génial ! », « comme c’était beau », « comme c’est triste »...) mais transmet son émotion, son expérience à travers la description du moment (en quelque sorte « sans le dire »). .

Objectivité : le poète est plus un dessinateur partageant une scène naturelle en trois rapides mouvements de pinceau pour l’imagination ou la mémoire.

 

Subjectivité : la subjectivité réside davantage dans le processus de perception et de sélection qui distingue l’instant. Devant un même arbre sous le ciel, quatre personnes différentes vivront/ressentiront quatre moments différents, donc quatre haïkus différents peuvent être écrits à partir de la même « scène »..

 

C’est également pour cela qu’il est important de considérer l’utilisation d’adjectifs. Les adjectifs ont tendance à décrire un sentiment, une opinion et peuvent être « dangereux » dans le haïku. Les adjectifs exprimant les couleurs, le climat, les descriptions physiques (héron cendré, matin froid, minuscule goutte...) sont évidemment différents des adjectifs exprimant l’opinion, l’état d’esprit, qui ont tendance à révéler plus de subjectivité (impressionnant, effrayant, intelligent, beau...)

 

Cela signifie aussi que le haïku ne doit pas « tout dire » ; il s’agit plutôt de suggérer, et de laisser le lecteur revivre l’instant et expérimenter l’émotion, relier les petits traits entre eux.

 

Un haïku est court et concis. « Pas trop de parlote » mais précis, c’est-à-dire le(s) bon(s) mot(s), plutôt que le mot plus beau ou une formulation embellie.

 

Il n’y a pas besoin d'« artifice », comme des rimes, un jeu de mots, de métaphores, tout ce qui pourrait  détourner l’attention de l’essence du moment.

 

Un haïku doit être ancré dans la réalité, et à l’origine un haïku se rapporte à la nature.

 

OBJECTIVITÉ NE SIGNIFIE PAS SANS ÉMOTION

Un haïku doit déclencher une émotion, un sentiment ou une sensation chez le lecteur. La description pure d’un moment ou d’un objet ne suffit pas; il doit contenir des sentiments ou des émotions provenant du moment/objet/sujet, sinon ce moment/objet et l’observateur sont éloignés/séparés, et le haïku peut être « plat », sans relief.

 

JUXTAPOSITION

Pour beaucoup, l’essence du haïku est la juxtaposition de deux éléments (images). Dans le haïku classique, il y avait la juxtaposition d’un aspect/élément naturel et saisonnier avec un autre élément. L’impact (émotion) provenant de l’intellect du lecteur proviendra de cette juxtaposition, de cette combinaison d’images/éléments. Certains haïkus peuvent n’avoir qu’une seule image et fonctionner très bien, mais les haïkus avec 3 éléments juxtaposés ou plus fonctionnent rarement. Voir kireji ci-dessous.

 

Autres considérations

 

Titres : en général un haïku n’a pas de titre. Comme toujours, des exceptions sont possibles. Mais un titre ne devrait pas être là pour expliquer le haïku, c’est-à-dire qu’un haïku avec un titre devrait également « marcher » sans le titre. Sinon, le titre est une ligne supplémentaire, une explication. Le titre ne doit pas donner une interprétation différente ou conduire à l’interprétation, à la compréhension pour le lecteur. Parfois, le titre est simplement le lieu (ville, ville, rivière...) où le haïku a été « vécu ». Il semble y avoir une tendance actuelle à (dans le cas où le titre est un lieu) mettre cette information après le haïku (c’est-à-dire en dessous), parfois en italique, ou en police plus petite, ou entre parenthèses... Cela vaut la peine d’être considéré.

 

Majuscules : c’est également un autre débat dans les langues occidentales (le japonais n’ayant pas de majuscules). Les premières traductions occidentales avaient une majuscule au début de chaque ligne, reflétant la pratique et la tradition de la poésie occidentale. Les majuscules dans le haïku ont plus ou moins disparu. Avoir 3 lignes avec une majuscule au début de chaque ligne peut sembler un peu encombrant, lourd. Des options comme pas de majuscules du tout (sauf quand une majuscule est grammaticalement requise comme pour un pays, une ville, etc.) ou une majuscule uniquement au premier mot de la première ligne semblent être les pratiques prédominantes aujourd’hui.

 

Rimes : généralement les rimes (en fin de ligne) sont évitées, ou du moins les rimes qui seraient une distraction, superflues dans le haïku, mais l’allitération, le son et le rythme sont des éléments importants d’un haïku. Le rythme est souvent un élément négligé à tort dans le haïku occidental.

 

17 syllabes/longueur : à l’origine, en japonais, les haïkus ont 3 sections (17 syllabes : 5-7-5) présentées en une ligne. Le nombre de syllabes est un débat depuis très longtemps dans le haïku occidental. La plupart pensent que 17 syllabes ne devraient pas s’appliquer à l’anglais, ou au français (et à d’autres langues occidentales), alors que certains poètes ont scrupuleusement suivi avec succès ce principe japonais (en particulier JW Hackett). Il n’y a pas vraiment de consensus sur ce point. Dans tous les cas, faites court, certains mentionnent le concept intéressant d’un poème à une respiration (c’est-à-dire que le haïku peut être lu sans avoir à prendre une seconde inspiration). Cette notion est plutôt intéressante et mérite d’être considérée (si le poète n’est pas un plongeur en apnée expérimenté).

 

Style : être court et concis ne signifie pas qu’un haïku n’a pas de structure, de syntaxe correcte ou d’éléments grammaticaux ou lexicaux. Un haïku n’est pas un télégramme (c’est-à-dire des segments non unis ou reliés par la grammaire), ni une liste de courses (c’est-à-dire des éléments mis les uns après les autres sans coordination ni lien). (Voir aussi la ponctuation ci-dessous).

 

3 lignes : il est plus ou moins accepté d’écrire des haïkus en 3 lignes (reflétant les 3 sections syllabiques du haïku japonais) mais il y a aussi une tendance croissante des « one-liners », un haïku écrit sur une seule ligne (qui renvoie à la présentation traditionnelle japonaise d’une ligne verticale ou horizontale). Mais 2 ou 4 lignes fonctionnent aussi. Peut-être considérer 4 lignes comme un maximum.

 

Répétitions : les éléments ne doivent pas être répétés ou redondants (hiver froid, neige blanche...). Il y a des haïkus très célèbres et géniaux avec des répétitions (comme le légendaire ah! Matsushima / Matsushima ah! / ah! Matsushima). Mais on peut facilement voir dans cet exemple que cette répétition n’est pas une redondance, une répétition maladroite ou superflue. Un mot peut être répété, mais c’est plus la redondance dans un haïku qui doit être examinée et évitée tandis que les répétitions doivent être bien considérées et réfléchies.

 

Coupure/Césure : ce que l’on appelle en japonais kireji (mot de césure) est une manière grammaticale, qui a généralement pour effet de diviser le poème en deux parties, comme avec un long tiret ou deux points, et crée donc l’opposition ou la juxtaposition des deux images/éléments dans la syntaxe du haïku est généralement perçu ou exprimé différemment dans les langues occidentales. Pour rendre cette césure, certains utilisent la ponctuation ou vont à la ligne suivante, l’enjambement... J’ai vu des options intéressantes telles que l’insertion d’un espace / espace dans la même ligne, une majuscule mise à un mot à l’intérieur d’une ligne (c’est-à-dire pas le premier mot de la ligne)…

 

Ponctuation : il semble que la ponctuation soit de moins en moins utilisée dans le haïku occidental. Pour certains, c’est un problème car le manque de ponctuation peut provoquer une erreur grammaticale ou un problème de syntaxe. Certains utilisent la ponctuation comme kireji (voir ci-dessus). Dans tous les cas, trop de ponctuation dans un haïku semble généralement une pratique qui mène à l’encombrement ou est maladroite. En ce qui concerne le point final, à la fin du haïku, il ne semble pas y avoir de consensus. La majorité semble aujourd’hui ne pas mettre de point final à un haïku.

 

Mot de saison : dans le haïku japonais, un kigo (qui était considéré comme obligatoire) aide à définir le moment de la saison où le poète a vécu le moment du haïku. Ces mots de saison se rapportent aux plantes et aux fleurs, aux animaux et aux insectes, au ciel et aux rivières et aux montagnes, aux festivals... Ils ont été compilés dans une sorte d’encyclopédie – le saijiki – qui est utilisée par les poètes et les lecteurs de haïku comme référence. L’un des avantages d’un mot de saison est également de « contenir » des couches d’informations dans certains cas (nature, histoire, religion...), ce qui signifie que beaucoup de signification(s) et de sens implicites peuvent être transmis avec un seul mot, ce qui est une ressource pratique compte tenu de la brièveté de cette forme.

 

Mot-clé : depuis plus récemment, la notion de mot-clé fait l’objet d’une certaine popularité (y compris au Japon)  et est parfois considérée comme un remplacement du mot de saison traditionnel. Dans ce cas, c’est un mot qui est « chargé » de sens et de couches de significations et qui est vital pour le haïku.

 

 


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